« Chicken Run : la menace nuggets » : que vaut la nouvelle couvée de Netflix ?

La poule Ginger, le coq Rocky et leur bande renaissent sur la plateforme. Malgré un scénario un peu poussif, cette volaille en folie nous fait encore rire.

Par Julien Dupuy

Chicken Run : la menace nuggets, les célèbres volailles du cinéma d'animation sont de retour sur Netflix le 15 décembre. 
Chicken Run : la menace nuggets, les célèbres volailles du cinéma d'animation sont de retour sur Netflix le 15 décembre.  © Aardman / Netflix

Temps de lecture : 6 min

Lecture audio réservée aux abonnés

Il aura fallu attendre 23 ans pour que l'intrépide poule Ginger, le coq Rocky et la bande de gallinacés évadés du poulailler de Chicken Run reviennent sur les écrans. Un délai d'autant plus surprenant à notre époque du cinéma franchisé, que le film fut un petit événement lors de sa sortie en 2000.
C'était, en effet, la première fois que le studio de Bristol, Aardman, se lançait dans le long-métrage, après avoir été révélé avec les merveilleux courts-métrages de l'inventeur Wallace et son chien Gromit. Ainsi, le succès de Chicken Run permit à un large public de découvrir les miracles de la claymotion, un pan spécifique de l'animation image par image dans lequel les marionnettes sont partiellement conçues en pâte à modeler. Autrement dit, les animateurs doivent bouger et sculpter les figurines sur chacune des 24 images qui composent une seconde de film !

La newsletter pop

Tous les troisièmes mercredis de chaque mois à 12h

Recevez le meilleur de la pop culture !

Votre adresse email n'est pas valide

Veuillez renseigner votre adresse email

Merci !
Votre inscription a bien été prise en compte avec l'adresse email :

Pour découvrir toutes nos autres newsletters, rendez-vous ici : MonCompte

En vous inscrivant, vous acceptez les conditions générales d’utilisations et notre politique de confidentialité.

Rien d'étonnant, donc, à ce que la conception de ce Chicken Run : la menace nuggets ait duré cinq ans. « Que voulez-vous que je vous dise ? Nous sommes juste très lents », plaisante le jovial Peter Lord, cofondateur d'Aardman et producteur du film. « En vérité, nous nous réunissons régulièrement pour échanger des idées qui pourraient déboucher sur de nouveaux films. Et régulièrement, le même sujet revenait sur la table : “Et qu'en est-il de Chicken Run 2 ?” Tout le monde avait envie de le faire, mais nous ne parvenions pas à trouver un point de départ narratif satisfaisant. »

À LIRE AUSSI « Pax Massilia », « The Envoys », « Slow Horses » ou « Scenes from a Marriage » : quelles séries regarder ce week-end ? Et de poursuivre : « Après des années de discussions infructueuses, nous avons décidé de donner à nos héros Rocky et Ginger un enfant, qui pourrait ouvrir un nouveau chapitre de leur vie. Ensuite, tandis que le premier Chicken Run parodiait les films de prison, et en particulier La Grande Évasion, nous avons cette fois décidé de revisiter le film de casse. La suite pouvait se résumer à une formule qui est restée tout au long du projet : “Sur le premier opus, ils devaient s'évader. Cette fois, ils doivent s'infiltrer !” »

Chicken Run, des poules pas mouillées

Quand Chicken Run : la menace nuggets s'ouvre, Ginger, Rocky et toutes les poules qui ont survécu au terrible élevage de la carnassière Miss Tweedy coulent des jours tranquilles dans un îlot coupé du monde. C'est là que naît puis grandit Molly. Et la poulette se révèle aussi intrépide que sa mère ! Un beau jour, elle décide, à l'insu de ses parents, de voler au secours de consœurs enfermées dans une énorme usine à nuggets. Rocky et Ginger, flanqués de tous leurs amis, vont rapidement se joindre à elle pour une nouvelle mission évasion. Les fans du premier opus l'auront donc noté : cette couvée se présente moins comme un renouveau que comme une déclinaison de Chicken Run premier du nom.

Un parti pris qu'assume totalement le réalisateur, Sam Fell : « Les gens se sont tellement investis dans le premier film qu'il fallait faire attention à ce que nous devions conserver et pouvions faire évoluer. Par exemple, initialement, l'enfant de Rocky et Ginger était un garçon. Mais nous nous sommes rapidement rendu compte que Chicken Run est avant tout une histoire de femmes fortes. C'est ainsi que le petit garçon est devenu une petite fille, Molly. L'autre conséquence de cette observation, c'est que Miss Tweedy est devenue la grande antagoniste, là où seul son complice, le Dr Fry, figurait dans les premières versions du scénario. »

Chair de poule

Si l'on reconnaît, en effet, la silhouette longiligne de Miss Tweedy, elle délaisse dans cette suite la défroque de la fermière irascible pour devenir une simili Némésis de James Bond, régnant avec classe sur un énorme abattoir high-tech. Son plan est l'une des meilleures trouvailles du film, puisqu'elle attendrit la chair des volailles en les enfermant dans un parc d'attractions qui pétrifie les pauvres bêtes, avant de les passer à la broyeuse. Un concept digne d'un film d'horreur, ce qui n'a rien de surprenant de la part de Sam Fell, qui avait signé le film de morts-vivants familial L'Étrange Pouvoir de Norman (pour un autre studio d'animation).

À LIRE AUSSI « Blue Eye Samurai » : pourquoi il faut regarder la série animée japonaise de Netflix « C'est très sain de faire un peu peur aux enfants, explique-t-il. Et puis, cette noirceur était déjà très présente dans le premier film. Ce fut même un sujet de discussion avec notre partenaire financier de l'époque, Jeffrey Katzenberg de DreamWorks Animations, qui redoutait constamment que nous allions trop loin. Mais selon nous, c'est tout à l'avantage du film. Les gags fonctionnent encore mieux quand on contraste le récit, quand on se permet d'être tour à tour effrayant, drôle et exaltant. C'est une combinaison formidable, surtout si vous parvenez à faire en sorte que le public tombe amoureux de ces petites marionnettes. Et pour le coup, Netflix, qui a financé cette suite, nous a totalement soutenus dans cette démarche. »

Bonnes pâtes humaines

Seulement, voilà : en dehors de cette noirceur réjouissante, Chicken Run : la menace nuggets peine à retrouver la fraîcheur et l'inventivité du premier film. Les gags sont souvent convenus, le scénario un peu poussif. Et pourtant, il se dégage un tel charme de ces décors miniatures et de ces marionnettes animées avec une patience surhumaine, que le film réussit à avoir raison de toutes les réserves. Et ce d'autant plus qu'Aardman a à cœur de conserver le caractère artisanal de son art.

« On encourage les animateurs à accepter une forme d'imperfection, comme la trace des doigts sur la pâte à modeler par exemple, explique Sam Fell. Cette imperfection contribue à la magie de l'image par image : vous sentez, quand bien même c'est de façon imperceptible, le travail de l'animateur 24 fois par seconde. Il y a une grande chaleur humaine qui émane de ce procédé. »

À LIRE AUSSI « Pinocchio » ou l'autobiographie déguisée de Guillermo Del Toro

Un procédé qui n'a jamais été aussi florissant qu'aujourd'hui. Outre l'oscar décroché cette année par le Pinocchio de Guillermo del Toro, l'animation image par image a été exploitée ces derniers mois par une quantité impressionnante de films : Mad God, Marcel le coquillage (avec ses chaussures), Wendell et Wild, Junk Head… Peter Lord et Sam Fell, eux-mêmes, s'étonnent de cet engouement par un art qui remonte au cinéma des origines. « Au milieu des années 1990, on a tous cru que l'animation image par image allait disparaître, en particulier quand nous avons découvert Toy Story, avoue Sam Fell. Mais paradoxalement, c'est le numérique qui a revigoré notre art : nous bénéficions d'une souplesse de fabrication grâce aux outils numériques, qui permettent à nos films de raconter tout type d'histoires en restant dans un budget raisonnable. »

Et Peter Lord d'enchérir : « Cet engouement se ressent aussi dans nos équipes. Ainsi, il nous est devenu bien plus facile de recruter aujourd'hui que par le passé. Mais c'est vrai qu'un studio d'animation image par image est un environnement plus sympathique qu'une production de film en images de synthèse. Nos équipes travaillent dans un monde physique : elles doivent parfois évoluer au milieu d'un décor miniature pour avoir accès à des marionnettes qu'elles manipulent avec leurs propres mains. Et sont cernées par d'autres plateaux de tournage, qui sentent le bois, la peinture, l'acier. C'est exaltant. » Et avec un nouvel épisode des aventures de Wallace & Gromit déjà en production, les animateurs du studio Aardman n'ont pas fini de mettre la main à la pâte !

Chicken Run : la menace nuggets (1 h 41). Disponible le 15 décembre 2023 sur Netflix.

À ne pas manquer

Ce service est réservé aux abonnés. S’identifier
Vous ne pouvez plus réagir aux articles suite à la soumission de contributions ne répondant pas à la charte de modération du Point.

0 / 2000

Voir les conditions d'utilisation
Lire la charte de modération

Commentaire (1)

  • hurlevon

    Chicken run c'est le sommet ! C'est en version cinema l'Animal Farm d'Orwell. Nazisme, communisme er islamisme.