« Le Monde après nous » : cinq raisons d’un carton sur Netflix

Premier blockbuster produit par le couple Obama, le thriller apocalyptique de Sam Esmail trône au sommet des audiences de la plateforme. Décryptage avec son réalisateur.

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Le Monde après nous, de Sam Esmail.
Le Monde après nous, de Sam Esmail. © Netflix/Higher Ground

Temps de lecture : 9 min

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Coup d'essai, coup de maître pour Barack et Michelle Obama : avec Le Monde après nous, leur première incursion dans le registre du film catastrophe, l'improbable couple de producteurs fait flamber les chiffres de Netflix. Du moins, à en croire les données communiquées le 12 décembre par le géant du streaming.

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Selon ce dernier, le thriller apocalyptique de Sam Esmail, depuis sa mise en ligne quatre jours plus tôt, a été visionné par 41,7 millions d'abonnés, le plaçant en tête du top 10 mondial des longs-métrages diffusés sur le portail, pour la semaine du 4 au 10 décembre. En France, Le Monde après nous est également premier de la classe.

Récit d'un week-end de terreur pour deux familles américaines, les Sandford et les Scott, contraintes d'affronter ensemble une cyberattaque majeure paralysant tout le pays, ce cauchemar orchestré par le créateur de la série Mr Robot synthétise une multitude d'angoisses contemporaines, qui a fait tilt auprès du grand public.

Adapté d'un roman de Rumaan Alam publié en 2020, Le Monde après nous était attendu au tournant depuis des mois, avec son casting de superstars, son sujet anxiogène et l'implication des Obama, en contrat avec Netflix depuis la création de leur société de production Higher Ground en 2018.

Pourquoi un tel jackpot ? Avec Sam Esmail, Le Point Pop revient sur les cinq raisons de ce rendez-vous réussi avec les foules inquiètes d'un XXIe siècle décidément très intranquille.

1) Le label Obama, gage de curiosité

La présence au générique de l'ex-couple Obama a certainement fourni au Monde après nous un capital curiosité non négligeable. Créée en mai 2018, leur société de production a rapidement sécurisé un contrat d'exclusivité avec Netflix.

Jusqu'ici, Barack et Michelle n'avaient proposé que des projets à l'impact plutôt américano-américain. Trois longs-métrages : la comédie dramatique Fatherhood en 2021 ; la même année, le biopic Worth, autour du combat de l'avocat Kenneth Feinberg pour l'indemnisation des victimes du 11 Septembre ; puis, en novembre 2023, un autre biopic, Rustin, sur la vie de l'activiste noir homosexuel Bayard Rustin.

Également au crédit de Higher Ground : des programmes pour la jeunesse, une demi-douzaine de documentaires et quelques podcasts.

C'est par l'intermédiaire de leur amie Julia Roberts que les Obama se sont investis dans Le Monde après nous : « J'avais lu le manuscrit du livre de Rumaan Alam avant qu'il ne soit publié, confie au Point Pop le réalisateur Sam Esmail. Je l'ai adoré et je l'ai envoyé à Julia, avec qui j'ai gardé d'excellentes relations depuis Homecoming [la série de Sam Esmail produite en 2018 pour Amazon Prime Video, NDLR]. Elle a tout de suite souhaité incarner le rôle d'Amanda et entrer à son tour dans la production du film. Quand le projet a été vendu à Netflix, les Obama se sont imposés assez naturellement, Barack étant un ami personnel de Julia. Il avait lui aussi lu et aimé le roman. »

L'auteur de Mr Robot poursuit : « Barack Obama est l'un des esprits les plus brillants que je connaisse sur cette planète, doublé d'un grand cinéphile, fan de films catastrophe. Pendant l'écriture du script, il m'a envoyé beaucoup de notes, il s'est vraiment impliqué dans la production, nous avons eu de longues discussions sur les personnages, les éléments d'apocalypse dans le film… C'était pour moi une aventure à la fois surréaliste et extraordinaire. Il était capital à ses yeux qu'on ne se rate pas sur un sujet pareil et que l'on fasse un bon film. Je peux vous confirmer qu'il a aimé le résultat ! » On veut bien croire Sam Esmail sur parole…

À LIRE AUSSI Hollywood : les raisons d'une grève historiqueDès le mois de septembre, dans une interview accordée à Vanity Fair, le réalisateur avait émoustillé les gazettes en confiant comment Barack Obama l'avait un peu recadré lors d'un coup de fil dans sa description de l'apocalypse : « J'avais été un peu trop loin dans le pessimisme visiblement et Barack m'a dit : “Vous êtes inexact sur quelques petits détails.” J'ai paniqué comme jamais ! Mais ses notes concernaient principalement les réactions de certains personnages pour les rendre un peu plus attachants. »

Malgré l'absence de promotion de la part des Obama, nul doute que les conversations autour de leur implication ont incité le public à venir en masse jeter un œil pour vérifier si leur premier film catastrophe… tournerait au désastre catastrophique.

L’opinion a le sentiment que plus rien n’est acquis et c’est pour cela que “Le Monde après nous” parle à tout le mondeSam Esmail

2) Le vertige de la fin du monde

Pandémie mondiale, prise d'assaut du Capitole à Washington, attaque de l'Ukraine par la Russie, tensions internationales ravivées depuis les massacres du 7 octobre en Israël et la guerre contre le Hamas à Gaza… Depuis 2020, la multiplication des crises anxiogènes globales rend plus que pertinente toute intrigue expliquant la peur ambiante de l'effondrement, doublée d'une crainte paranoïaque de l'agression par une coalition d'États voyous.

Même si le roman de Rumaan Alam a été écrit – ainsi que le script du film – avant la plupart de ces calamités, le sentiment d'insécurité collectif, en cette fin d'année 2023, offre une puissante caisse de résonance au scénario catastrophe du Monde après nous.

« L'impression générale d'être au bord du précipice est actuellement partagée dans le monde entier, explique Sam Esmail. Nous sommes bombardés de scénarios d'apocalypses nucléaire, climatique, pandémique ou cyber. L'opinion a le sentiment que plus rien n'est acquis et c'est pour cela que Le Monde après nous parle à tous. »

Chapitré comme un livre, le thriller technologique de Netflix fait aussi trembler par quelques idées simples mais bien stressantes, comme cet enchevêtrement de voitures Tesla devenues folles sur une bretelle d'autoroute, ou cette étrange sirène stridente tombée du ciel, terrifiante trompette de Jéricho terrassant les protagonistes.

L'intrigue tape également dans le mille, surtout aux États-Unis, lorsqu'elle confronte deux familles, les Blancs – Clay et Amanda Sandford (Ethan Hawke et Julia Roberts) et leurs enfants – aux Noirs – G.H. Scott et sa fille Ruth (Mahershala Ali et Myha'la Herrold).

Coincés dans la maison de campagne des Scott, tandis qu'à l'extérieur tout se détraque, les deux groupes doivent apprendre à vivre ensemble malgré une méfiance réciproque et une tension raciale à bas bruit. Un écho aux divisions ethniques et aux non-dits toujours vifs outre-Atlantique, mais Sam Esmail préfère adopter « une vision optimiste dans le film parce que la seule issue pour nous est d'apprendre à dialoguer plutôt que le conflit, surtout si nous sommes dans une situation de crise majeure ».

Julia Roberts et ses tympans, suppliciés par une sirène infernale dans <em>Le Monde après nous.</em>
 ©  Netflix/Higher Ground
Julia Roberts et ses tympans, suppliciés par une sirène infernale dans Le Monde après nous. © Netflix/Higher Ground

3) Nos addictions technologiques

Si Le Monde après nous s'est attiré les faveurs du public, c'est aussi parce qu'il décrit un autre sentiment que nous partageons tous : notre techno-toxicomanie.

L'une des premières scènes du film est un plan séquence virtuose filmé à l'intérieur de la voiture de la famille Sandford, en route pour son escapade bucolique. La caméra passe d'un membre du clan à l'autre : Amanda au téléphone avec une amie, Clay au volant absorbé par la radio, leur ado Archie (Charlie Evans) sur un jeu vidéo et sa petite sœur Rose (Farrah Mackenzie) tentant de regarder le final de Friends sur sa tablette…

« C'est une situation typique de notre monde moderne, une scène qu'on n'aurait jamais pu filmer voici trente ou quarante ans, explique Sam Esmail. Je voulais installer cette dynamique familiale et montrer cette dépendance collective à la technologie qui nous piège dans nos bulles respectives. C'est une métaphore de tout ce qui va leur arriver dans le film. »

Sam Esmail reconnaît lui-même s'identifier au personnage de Clay, qui avoue au détour d'une scène qu'il serait « un bon à rien » sans son smartphone et son GPS. « Sans mes gadgets, je ne serais pas un adulte fonctionnel, renchérit le réalisateur. Je suis fasciné par la technologie depuis l'école primaire, et encore plus depuis qu'elle progresse à une vitesse exponentielle, d'une année à l'autre. »

J’ai été très fan de “Friends”, une série si iconique et qui a touché tout le monde en son tempsSam Esmail

4) Julia Roberts, « la Michael Jordan des actrices »

Rare au cinéma ces dernières années, l'ex-Pretty Woman (ou Erin Brockovich, selon vos préférences) porte sur ses épaules toute la paranoïa de son personnage d'épouse misanthrope et vaguement raciste – un vrai contre-emploi pour l'actrice. Coproductrice du film, qu'elle a apporté sur un plateau à ses amis, les Obama, la comédienne était le premier choix pour camper Amanda Sandford, qui est pratiquement de toutes les scènes.

La reine Julia, que Sam Esmail a surnommée « la Michael Jordan des actrices », lâche les freins dans deux d'entre elles : lorsque son personnage fait fuir une meute de cerfs menaçants à grands coups de cris et de moulinets avec les bras (on a le droit d'être un brin gêné) ; plus tard, Amanda se livre à une sensuelle danse de réconciliation avec George H. Scott (Mahershala Ali), au son du tube de R'n'B « Too Close ».

À LIRE AUSSI Camille Cottin : comment elle est devenue l'incarnation du nouveau glamour français à HollywoodUne idée ajoutée dans le scénario par Sam Esmail, pour humaniser davantage Amanda qui, jusque-là, se sera surtout distinguée par son comportement passif-agressif avec les Sandford et ses joutes verbales avec Ruth, la fille de George.

Autour de l'étoile Roberts, le reste du casting reste le point fort du Monde après nous, d'Ethan Hawke à Mahershala Ali en passant par les jeunes Charlie Evans, Farrah Mackenzie et Myaha'la Herrold. Mention spéciale, aussi, au toujours formidable Kevin Bacon, dans le rôle d'un voisin survivaliste.

5) Le coup de poker « Friends  »

C'était une simple allusion dans le roman, Sam Esmail en fait un véritable fil rouge : la mythique sitcom Friends, dont la jeune Rose Sandford essaie désespérément de regarder l'ultime épisode sur sa tablette, symbolise ces années 1990 prospères et insouciantes pour l'Amérique d'avant le 11 septembre 2001. Son tube légendaire, le « I'll Be There for You » des Rembrandts, est même repris au générique final du Monde après nous, dans un merveilleux effet de détournement situationniste.

Dans le film, à cause du black-out généré par la cyberattaque visant son pays, Rose ne peut plus se réfugier dans sa série favorite et se laisse consumer par une seule obsession : trouver le moyen de voir la fin de Friends, coûte que coûte. Un but qui ne trouvera sa solution que dans les dernières minutes de l'intrigue.

« J'adore le parcours de ce personnage, commente Sam Esmail. C'est une ado dysfonctionnelle incapable de trouver du réconfort auprès de sa famille – qui d'ailleurs l'ignore pendant quasiment tout le film – et qui n'a d'autre envie que de se réfugier dans les relations des personnages fictifs de Friends. Je trouve cette dualité intéressante et, moi-même, j'ai été très fan de Friends, une série si iconique et qui a touché tout le monde en son temps. »

Malin, le cinéaste n'ignore évidemment pas qu'en janvier 1996, Julia Roberts a elle-même joué dans un épisode de la saison 2 de la célèbre série, où elle incarnait une ex-camarade de classe de Chandler, harcelée par ce dernier à l'école.

Le réalisateur ne pouvait en revanche pas prévoir que, le 28 octobre, l'interprète de Chandler, Matthew Perry, allait mourir à 54 ans, seul à son domicile, dans des circonstances toujours indéterminées.

Une tragique disparition qui replace Friends sous les feux de la rampe, après plusieurs controverses post-wokistes sur l'humour de la série de NBC, désormais jugé « problématique ». L'intégralité des dix saisons de Friends est, par ailleurs, toujours disponible sur Netflix.

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Commentaires (16)

  • Beck2

    Mauvais téléfim
    au scenario faiblard, bourré d'incohérences
    La "signature Obama" = on ne m'y reprendra plus...

  • Pacha17

    Absolument aucun intérêt : intrigue déjà vue, musique insupportable, effets de caméra "déroutants". J'ai regardé la signature Obama et je l'ai regretté.

  • Freedom

    Rosemad. Non je n’ai pas dit formidable. Les sources sont verifiables par vous sur les sites officiels. Les reactions negatives sur Obama sont souvent dues au daut sue, effecrivelent, Obama atant ete le chouchou des medias, beaucoup de gens ont une reaction instinctive contraire mais les chiffres sont la.