« L’Art du crime » : pourquoi cette série de France 2 séduit autant le public

CE SOIR À LA TÉLÉ. Sans prétention, la comédie policière portée par Nicolas Gob et Éléonore Bernheim offre une plongée aussi divertissante qu’instructive dans le monde de l’art.

Par Katia De la Ballina

Antoine Verlay (Nicolas Gob) et Florence Chassagne (Éléonore Bernheim) mènent l'enquête ce soir sur France 2.
Antoine Verlay (Nicolas Gob) et Florence Chassagne (Éléonore Bernheim) mènent l'enquête ce soir sur France 2. © France 2

Temps de lecture : 6 min

Lecture audio réservée aux abonnés

Si les séries se sont aujourd'hui fait une place au panthéon culturel, fût-il télévisuel, elles peinent toujours à voir l'histoire de l'art en peinture. Difficile, en effet, de captiver un large public avec un sujet parfois perçu comme élitiste ou rébarbatif. Une fiction a pourtant réussi à l'encadrer… avec succès ! Depuis cinq ans, L'Art du crime, dont France 2 diffuse un épisode inédit ce lundi 4 décembre, permet à des téléspectateurs toujours plus nombreux (jusqu'à 5,5 millions !) de percer les secrets de chefs-d'œuvre tels que Le Cri d'Edvard Munch, Le Radeau de la Méduse de Théodore Géricault ou encore Le Déjeuner sur l'herbe d'Édouard Manet
Car, dans ce polar, la clé des meurtres réside toujours dans les tableaux (plus rarement les sculptures) de grands maîtres, qui se révèlent au fil d'intrigues astucieuses et très documentées : « Dans cette série, tout est véridique, ce n'est pas Da Vinci Code. L'Art du crime est un programme intelligent, où l'on apprend toujours quelque chose. À la fin d'un épisode, le téléspectateur a l'impression de connaître un peu mieux l'artiste dont il a été question, se félicite Joachim de Vasselot, producteur de la série chez Gaumont TV. En ce sens, c'est un vrai programme de service public, mais avec des codes très grand public. »

La newsletter culture

Tous les mercredis à 16h

Recevez l’actualité culturelle de la semaine à ne pas manquer ainsi que les Enquêtes, décryptages, portraits, tendances…

Votre adresse email n'est pas valide

Veuillez renseigner votre adresse email

Merci !
Votre inscription a bien été prise en compte avec l'adresse email :

Pour découvrir toutes nos autres newsletters, rendez-vous ici : MonCompte

En vous inscrivant, vous acceptez les conditions générales d’utilisations et notre politique de confidentialité.

À LIRE AUSSI « Panda » : la nouvelle série de TF1 avec Julien Doré fait un carton !

Pour intéresser les curieux à son originale leçon d'histoire, L'Art du crime s'appuie, en effet, sur un genre classique à l'efficacité éprouvée : la comédie policière colorée d'une touche de romance.

L'art du crime ou l'art d'apprendre sans en avoir l'impression

À l'image de nombreuses séries à succès – Candice Renoir, HPI, en France, Castle ou Mentalist aux États-Unis –, la fiction de France 2 met ainsi en scène un duo antagoniste qu'évidemment tout oppose et qu'évidemment tout va finir par rapprocher… ou presque, leur histoire d'amour éternellement contrariée dessinant une toile de fond sentimentalo-comique aux enquêtes.

Certes compétent mais passablement inculte, Antoine Verlay (Nicolas Gob, révélé dans Un village français), ancien flic de la brigade criminelle désormais affecté à l'Office central de lutte contre le trafic des biens culturels (l'OCBC, créé en 1975), se voit obligé de faire équipe avec Florence Chassagne (Éléonore Bernheim), historienne de l'art du Louvre aussi brillante que névrosée, pour résoudre les crimes liés à un univers qui le dépasse. « Le personnage d'Antoine ne connaît rien à l'art, ce qui permet de mettre à l'aise le téléspectateur, explique Pierre-Yves Mora, cocréateur et coscénariste de la série avec Angèle Herry-Leclerc. C'est une façon de le décomplexer. »

À LIRE AUSSI Pourquoi la série « Astrid et Raphaëlle » cartonne autant sur France 2 ?

Heureusement Antoine le Candide peut-il compter sur les explications lumineuses de l'érudite Florence Chassagne, qui éclaire au passage un public conquis. La mécanique, efficace, reflète aussi la démarche des auteurs, autodidactes revendiqués : « On a le goût de l'art, mais, quand on commence l'écriture d'un scénario, on ne connaît rien à l'artiste nous non plus. On l'aborde par l'angle du divertissement et on se documente sur sa biographie et sur son œuvre afin de construire l'intrigue », souligne Angèle Herry-Leclerc. L'idée ? Enrober l'ambition pédagogique dans le jeu policier afin d'apprendre… sans en avoir l'impression !

Un jeu de piste policier dans le monde de l'art

En général, le binôme de scénaristes part de la vie d'un grand maître célèbre ou plus méconnu et cherche ensuite un angle policier pour tricoter son récit : « La difficulté, c'est de trouver le principe pour mettre en valeur les connaissances de notre historienne de l'art, car ce sont elles qui font avancer l'enquête ! » explique la paire d'auteurs. En décembre dernier, l'épisode centré sur Édouard Manet prenait ainsi l'allure d'un jeu de piste : « On a imaginé les détails de son tableau L'Olympia – le bouquet de fleurs, le chat noir – comme autant d'indices que Florence Chassagne réussit à la fin à interpréter… » Quant à l'enquête de ce lundi 4 décembre, intitulée « Versailles, es-tu là », elle s'intéresse à la portraitiste préférée de Marie-Antoinette, Vigée Le Brun. Ses relations avec sa fille adorée font écho aux crimes de la soirée, comme le découvre rapidement l'héroïne. Comment ? Tout simplement en discutant avec la défunte peintre.

Depuis l'enfance, l'experte en histoire de l'art converse en effet avec les illustres grands maîtres, qui peuplent ses rêveries : « Pour parler des peintres, il fallait les rendre le plus vivants possible… et donc les voir ! On a donc fait d'eux les amis imaginaires de Florence », précise Pierre-Yves Mora. Dans la série, Edgar Degas et Henri de Toulouse-Lautrec ont, par exemple, pris les traits de Bruno Debrandt et Bruno Solo, en costume d'époque : « Incarner ces artistes est un moyen d'évoquer leur œuvre sans être didactique », poursuit Angèle Herry-Leclerc.

À LIRE AUSSI Dans les secrets du château de VersaillesEt l'intrigue de progresser tout en remontant le temps. En 24 épisodes, L'Art du crime a convoqué les visages de la Renaissance, s'est aventurée dans les mystères de l'Égypte antique et s'est promenée dans les jardins artistiques des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles… Mais elle n'a pas encore investi l'époque contemporaine.

L'art du crime tourné dans des décors exceptionnels

Pour des questions de droits, la série ne peut traiter que des artistes dont les œuvres sont tombées dans le domaine public, sauf à payer les ayants droit. Mais, comme le rappelle Joachim de Vasselot, « le budget, qui correspond à celui d'une fiction de prime time majoré de 10 %, n'est pas extensible et L'Art du crime coûte cher à produire ». Car la série, et c'est là un autre de ses atouts, se déroule majoritairement dans des musées et autres joyaux du patrimoine français : « C'est notre petit côté Secrets d'histoire », s'amuse le producteur, avant de pointer le challenge que cela représente en termes de coûts – outre la location des musées, il faut en payer les services de sécurité et de gardiennage, sans compter les reconstitutions soignées des ateliers d'artistes – et de logistique.

Ces décors exceptionnels sont en effet ouverts au public et les tournages ne sont possibles que lors de leurs jours de fermeture, souvent consacrés à la restauration des œuvres, à des travaux de maintenance ou à la tenue de divers événements : « La fenêtre de tir est très étroite et c'est un casse-tête pour tout faire entrer dans le planning », avoue-t-il. Autre difficulté : la série doit partager les disponibilités limitées de ces lieux convoités : « Grâce au crédit d'impôt international, la production de programmes étrangers est facilitée en France. C'est une bonne chose pour le marché, mais nous sommes en concurrence avec des séries au budget très important, comme Daryl Dixon : The Walking Dead… »

Séduits par la qualité de L'Art du crime, les musées et autres monuments nationaux continuent néanmoins de lui ouvrir volontiers leur porte. Ce fut le cas du château de Versailles, qui a récemment accueilli les équipes dans la chambre de Marie-Antoinette, la galerie des Glaces et ses magnifiques jardins. De quoi attirer les amateurs devant leur écran en France comme à l'étranger, où la série a été vendue dans les cinq continents : « On a même des projets de remake dans les cartons », se félicite Joachim de Vasselot. À croire que, pour L'Art du crime, le succès est l'enfance de l'art.

À ne pas manquer

Ce service est réservé aux abonnés. S’identifier
Vous ne pouvez plus réagir aux articles suite à la soumission de contributions ne répondant pas à la charte de modération du Point.

0 / 2000

Voir les conditions d'utilisation
Lire la charte de modération

Commentaires (9)

  • Le sanglier de Génolhac

    Hier soir épisode laborieux. Et je suis aimable.

  • otello2528

    C est raté
    malgré Versailles au début l épisode m a déçu cette fois.
    la toile de fond des 2 protagonistes prenait beaucoup trop de place !

  • desmona

    J’adore cette série, intelligente, intéressante, drôle et surtout cultivante.