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Prenant au pied de la lettre le vieil adage qui veut que dans les vieilles poêles, l'on fasse les meilleures tortillas, le groupe M6 remet le couvert avec Un, dos, tres, presque vingt ans après le raz de marée ibérique provoqué en France par cette série. Souvenez-vous : en 2004, cette histoire de jeunes aspirants à la gloire, usant leurs fonds de legging sur les bancs d'une école de danse, fait grimper les audiences des fins d'après-midi de la petite chaîne qui monte… En 2023, on reprend la même école, de nouveaux élèves, quelques anciens pour jouer les professeurs et c'est reparti pour une tournée de sangria bon marché.
En 2004, M6, portée par le succès des séries de la trilogie du samedi soir (Roswell, Charmed, Buffy contre les vampires…), cherche à booster sa grille de journée. Et quoi de mieux que cette petite série espagnole qui a largement fait ses preuves sur la chaîne privée Antena 3. Avec à la clé, un petit recalibrage maison (les 84 épisodes de 80 minutes sont diffusés sous la forme de 130 épisodes de 50 minutes). Impossible également de garder le titre original Un Paso adelante (« Un pas en avant »). Ni uno, ni dos, M6 opte pour Un, dos, tres, en s'inspirant du tube international de Ricky Martin, « Maria », dont le refrain clamait haut et (très) fort « Un, dos, tres, un pasito palante, Maria ».
Un, dos, tres ou un Fame version tortilla
Rien de très neuf dans le concept de cette série aux scénarios minimalistes dragouillant, sans fausse pudeur, un jeune public friand d'amourettes sucrées et contrariées. Un, dos, tres, c'est un Fame à la sauce goût chorizo, plus cheap et moins audacieuse que le film d'Alan Parker qui, au début des années 1980, avait donné naissance à une série, pas terrible mais pas honteuse pour autant, qui dura cinq ans. En réalité, le plus terrible dans Un, dos, tres, ce sont les doublages façon télénovela. Pour le reste, la production n'a pas coché la case « prise de risque » et donne dans le formatage universel.
L'histoire est simple : c'est celle d'une école de spectacle, mêlant cours de danse et de chant, au sein de laquelle les destins d'une poignée d'élèves hyperstéréotypés se croisent et se décroisent au rythme de leurs flirts, leurs amours et leurs petites combines pour devenir les stars de demain. Rien de bien déstabilisant dans un monde cathodique où Star Academy donne le la, où Lorie et Jenifer font figure de reines incontestées de la variété française.
D'ailleurs, la planète ado tombe très vite sous le charme latin de ces nouveaux héros un brin plus délurés que les amoureux transis de Dawson. Et en quelques mois seulement, les posters de Beatriz Luengo (Lola), Monica Cruz (Silvia), Pablo Puyol (Pedro) et Miguel Angel Muñoz (Roberto) tapissent les murs de leurs chambres. Si Monica est d'abord la chouchoute des médias (être la sœur de Penélope Cruz lui ouvre forcément les colonnes des magazines télé ou people, même si elle n'a pas grand-chose à dire), elle va se faire voler la vedette par Beatriz Luengo, qui vendra dans l'Hexagone 130 000 exemplaires de son premier album.
Vingt ans plus tard, en pleine ère du recyclage télé éhonté où le reboot est roi, on ne change pas une recette qui gagne. Après avoir fait son retour en Espagne, Un, dos, tres reprend du service dès ce jeudi soir sur W9, après avoir squatté la plateforme du groupe, 6Play. Beatriz Luengo, Miguel Angel Muñoz et Monica Cruz enfilent à nouveau le tutu, avec, chevillé au corps, le même tonus, le Botox en plus, ravis d'être à nouveau de l'aventure au vu de carrières au point quasi mort. Et tant pis pour ceux qui n'ont pas été réinvités à minauder sur le parquet… « On ne pouvait pas tous être là, il fallait laisser de la place aux nouveaux personnages », justifie, philosophe du dimanche, Miguel Angel Muñoz, qui jure que Pablo Puyol, laissé sur la touche, reste son « meilleur ami ». Ouf !
Un, dos, tres : nouvelle génération : on reprend presque tous les mêmes
Mais ont-ils bien fait de repartir pour un tour ? Au vu de l'accueil reçu lors du festival Canneséries où ils avaient été invités en avril dernier, ils auraient eu tort de se priver. La salle de spectacle qui les accueille ce samedi après-midi pour évoquer cette nouvelle mouture est pleine à craquer. Des trentenaires survoltés se sont donné le mot pour retrouver leurs héros d'antan. De quoi réjouir les comédiens, ravis de surfer à nouveau, le temps d'une petite heure, sur la vague du succès. Si Monica Cruz joue plutôt la carte de la sobriété, le musculeux Miguel Angel Muñoz, tout en débardeur, ne tarde pas à « animer » lui-même la rencontre, suscitant les demandes de selfies avec ses fans de la première heure parfois venus directement d'Espagne.
La palme de l'émotion la plus surjouée revient à Beatriz Luengo, enrubannée dans une robe en taffetas fuchsia, qui tient absolument, avant de répondre à ses fans, à verser quelques chaudes larmes de joie en guise de remerciements pour cette ferveur. À leurs côtés, les petits nouveaux représentés par Monica Maranillo et Quique Gonzalez assistent, somme toute un peu médusés, à cet échange auquel, pour le moment, ils n'auront pas l'occasion de participer, totalement boudés par les groupies du jour.
Il n'empêche : tout est fait pour faire d'eux les stars de demain. Certes, les scénarios, largement plus inclusifs, restent au ras du parquet, mais Un, dos, tres : nouvelle génération a bien appris ses leçons et lorgne sans complexe le succès des séries espagnoles qui tiennent désormais le haut du pavé sur Netflix, Elite en tête. Un vent torride souffle sur des intrigues arrachant volontiers les sous-vêtements des protagonistes. D'ailleurs, dès le premier épisode, en moins de temps qu'il n'en faut pour exécuter un entrechat, un des acteurs affiche plein écran un fessier musclé. Le ton est donné : ay, qué calor !
Les huit épisodes d'Un, dos, tres : nouvelle génération sont diffusés sur W9 à partir de ce jeudi 16 novembre à 21 h 05.
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