Temps de lecture : 3 min
-
Ajouter à mes favoris
L'article a été ajouté à vos favoris
- Google News
La saison 1 nous avait scotchés. Malgré quelques faiblesses et maladresses, en dix épisodes courts et percutants, Franck Gastambide (Taxi 5, Les Kaïra, Pattaya…) était parvenu à dresser un portrait acéré du milieu du hip-hop en France, le premier qui ait jamais été réalisé. Nous avions alors suivi l’ascension fulgurante du jeune rappeur Apash, perturbée par ses clashs avec Mastar (qui n’était pas sans rappeler la rivalité entre Kaaris et Booba, tragédie œdipienne du rap français) et étions restés abasourdis par sa fin ultraviolente… Validé par le milieu, le public (plus de 20 millions de visionnages en quelques semaines, prix du public à CanneSéries…) et par Le Point, Gastambide a remonté le son et s’est replongé dans le monde impitoyable du rap français.
Dans la saison 2, Brahim et William veulent faire perdurer l’héritage d’Apash, assassiné brutalement au sommet de sa carrière. Ils se transforment en chefs d’entreprise, créent le label Apash Music, sous le parrainage de l’ancien rival Mastar (l’ex-footballeur, acteur et rappeur Moussa Mansaly, alias Sam’s) et du gentil beatmaker Sno (Franck Gastambide lui-même) et partent à la recherchent du nouveau phénomène du rap. Problème : la voix plus prometteuse de France est celle d’une… fille. Aïe. « Trop risqué ! » « On veut vendre des albums nous ! », « Ça marchera jamais ! », crie-t-on de toutes parts. Encore une fois, la fiction ressemble à s’y méprendre à la réalité. Car contrairement à l’Angleterre et aux États-Unis où elles cartonnent, dans l’Hexagone, depuis (et à part) Diam’s, les rappeuses peinent toujours à grimper au sommet des classements de ventes de disques pour se faire entendre du grand public.
La même toile de fond
Mais Sara (incarnée par Laetitia Kerfa, alias Original Laeti), vendeuse de baskets charismatique et talentueuse à la vie compliquée, essuiera les remarques sexistes (« fais de la pop », « essaie de chanter », « une rappeuse hyper forte vaudra toujours moins qu’un rappeur moyen ») et « éteindra » de son flow brûlant ses homologues masculins. Rebaptisée Lalpha, elle convaincra les médias, les rappeurs Soolking et Alonzo (l’occasion d’excellents featurings)… Avant d’être rattrapée par son passé dans les quartiers. Car on retrouve dans les deux saisons la même toile de fond : la difficulté pour les rappeurs de sortir de la rue.
À LIRE AUSSI Franck Gastambide : « Cette saison de « Validé » est meilleure que la première »
La répétition des scénarios est d’ailleurs la limite de cette nouvelle saison. Si Apash devait s’extraire de sa condition de dealer de drogue, Lalpha doit s’extraire de sa condition de femme… La construction des épisodes est toujours un peu la même : à chaque fois un obstacle à surmonter : caïd des cités à éviter, nouvelle instru à maîtriser, contrat à négocier, média mainstream à convaincre, collaboration à assurer, réseaux sociaux à faire buzzer… Les négociations se font à coups de poing dans des bars à chicha ou entre les tours des quartiers. Les fans de rap apprécieront les clins d’œil et apparitions.
Mais les scénaristes pèchent un peu par paresse : les méchants manquent vraiment de profondeur, les blagues sont lourdes, on aimerait plus de musique et moins d’intrigues. Validé saison 2 n’est peut-être pas « une dinguerie », mais ça vaut le coup de s’accrocher. Car derrière son charmant sourire, Lalpha combat les violences conjugales, le revenge porn, la sexualisation des femmes, le cyberharcèlement, le machisme dans la musique… Depuis la diffusion de la série, la carrière de Hatik a fait un bond. Il a été propulsé au Zénith, nommé aux Victoires de la musique et son album a été certifié platine. Pour Original Laeti, on a hâte que la réalité dépasse la fiction.
Validé 2 (diffusé sur Canal +)
Personnellement, avec tout ce que véhicule de négatif ce style de musique (et je me force à appeler ça de la musique), je ne regarderai pas cette série. Faire l'apologie de la haine sous toutes ces formes n'est pas ma conception de la musique qui est faite pour adoucir les mœurs.
Je boycotte, c'est de la crotte, j'reste dans ma grotte...
Ah bin tiens, moi aussi j'fais du rap !
... Y a plus personne ! Pourtant, c'est un beau sujet, le rap. On aimerait entendre ce que les lecteurs du Point ont à dire sur cet art. S'ils l'apprécient, ou pas, ce qu'ils pensent de séries TV à la gloire de gens qui leurs ressemblent au fond assez peu, je pense. Je me trompe peut-être. Personnellement, j'ai beaucoup de mal avec le rap, mais c'est interdit de dire qu'on n'aime pas le rap... Et je m'étonne que l'on encense de manière assez unanime une forme d'expression qui a pu célébrer (et célèbre encore) la misogynie, le gangstérisme, la drogue, l'argent facile, l'homophobie, la haine de la nation et autres choses encore. Il est intéressant de noter que toutes ces dimensions sont justement celles qui préoccupent au premier chef l'intelligentsia, mais contre le rap, on ne l'entend pas. Pourquoi ?