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Bree Van de Kamp, l'inoubliable ménagère psychorigide de Desperate Housewives, aurait sûrement été horrifiée et traumatisée par les incidents qui ont perturbé le défilé de stars sur le tapis rouge de Séries Mania le 23 mars dernier. Mais Marcia Cross, son interprète dans la mythique série, elle, n'a pas été scandalisée ni impressionnée par la bousculade qui a commencé aux alentours de 21 heures, quand plusieurs dizaines d'opposants à la réforme des retraites ont soudainement fait irruption, scandant des slogans anti-Macron et tentant de renverser des barrières, avant l'intervention des forces de l'ordre…
Obligée cependant d'interrompre sa séance de dédicaces pour être évacuée à l'arrivée des manifestants, la comédienne américaine de 61 ans s'est même montrée compréhensive à l'égard de ces derniers : « J'adore les Français, qui se battent pour leurs convictions, a-t-elle affirmé le lendemain. Je préférerais m'occuper de vos poubelles dans les rues plutôt que de nos fusillades de masse. Je ne minimise pas du tout la question des retraites en France, mais aux États-Unis, nous avons de sérieux problèmes concernant la santé – nous n'avons pas d'assurance médicale – ou les armes à feu… » Et l'actrice d'ajouter : « Vous avez la chance de vivre dans un pays où l'on peut s'exprimer, ce n'est pas le cas partout dans le monde. »
La période compliquée de Melrose Place
Histoire d'illustrer son propos, cette citoyenne impliquée a ensuite évoqué la situation en Corée du Nord, dont elle a récemment pris conscience en lisant le témoignage d'une jeune femme sur le sujet : « J'étais horrifiée. Je ne sais pas pourquoi je n'avais jamais réfléchi à ce qu'il se passait là-bas avant. C'est comme s'il y avait un mur qui m'en empêchait. Grâce à son livre, j'ai pu le franchir. C'est ce qui est intéressant avec la littérature, la télévision, le cinéma : ils nous permettent de nous ouvrir sur le monde, de nous donner à voir d'autres points de vue. C'est la raison pour laquelle j'aime tant l'art. »
Un amour qui est né lors de son premier passage sur les planches, à 7 ans, dans la pièce The Witch of Blackbird Pond (La sorcière de l'état du merle) : « Donner vie à ce personnage était si excitant ! J'ai été mordue, et la passion de la comédie ne m'a plus jamais quittée », s'est souvenue Marcia Cross lors de sa masterclass devant un parterre de près de 1 400 fans, comblés qu'elle ait choisi cette voie… C'est peu dire en effet que la charismatique rousse a marqué leur esprit de sériephiles. Non pas tant pour ses apparitions, multiples à défaut d'être toujours remarquées, dans des fictions à succès telles que Cheers, Arabesque, Madame est servie ou Everwood, mais pour son impeccable interprétation de deux personnages parmi les plus iconiques de la télé.
Le premier ? Kimberly Shaw, médecin psychotique et machiavélique du soap de Darren Starr Melrose Place, revenue d'entre les morts pour tourmenter ses anciens amis : « C'est le personnage le plus fou que j'ai jamais incarné », s'amuse l'actrice, qui a traumatisé des générations de spectateurs avec la scène devenue culte dite « de la perruque ». On y voit Kimberly tout juste ressuscitée, qui se réfugie dans une salle de bains pour enlever le postiche, révélant ainsi une horrible cicatrice faisant le tour de son crâne : « Je n'avais aucune idée de l'impact de cette séquence à l'époque-là. J'essayais simplement de faire les choses bien et de continuer à avancer ! » Car Marcia traverse alors « une période très compliquée » : « J'avais perdu quelqu'un que j'aimais [son compagnon Richard Jordan, décédé en 1993, NDLR]. Kimberly est folle, et moi j'étais folle de chagrin ! J'étais en deuil, cette série a été l'occasion de sortir de ma peine. Elle a été thérapeutique pour moi. »Je n’ai jamais regardé le dernier épisode de “Desperate Housewives » et je ne le ferai jamais !Marcia Cross
Autre partition inoubliable : celle de Bree Van de Kamp. En 2003, la charismatique rousse démontre une nouvelle fois tout son talent tragi-comique dans les chaussures impeccablement cirées de cette Desperate Housewive, épouse frustrée et mère contrariée d'un adolescent gay : « À l'origine, je voulais le rôle de Mary Alice [campée finalement par Brenda Strong, NDLR], mais Marc Cherry [le créateur de la série, NDLR] en a décidé autrement, se souvient l'artiste, qui avoue avoir été effrayée par ce « défi ». « Bree était compliquée pour moi au début, tant elle était too much. Mais cette série a changé ma vie ! Je ressens beaucoup d'amour et de reconnaissance envers l'équipe tout entière. »
Bree, l'anti-Marcia
N'en déplaise à ceux qui pointaient la mésentente des actrices sur le plateau : « On a eu beaucoup de chance, on était connectées, on l'est encore… » De quoi rendre le clap de fin très éprouvant : « J'étais assise avec Marc et les filles autour d'une table, c'était vraiment horrible », se rappelle celle qui admet n'avoir jamais regardé le dernier épisode de la série : « Et je ne le ferai jamais ! »Si la carrière de Marcia Cross peut impressionner, elle n'a pas pour autant été un long fleuve tranquille. Difficile en effet de retrouver du travail quand on est toujours associée à « crazy Kimberly » : « C'était douloureux. J'ai failli tout arrêter », révèle l'actrice, qui a même décroché un diplôme de psychologie pour devenir thérapeute avant de rejoindre les allées de Wisteria Lane. Même cause, même effet : depuis l'inflexible Bree, Marcia Cross s'est faite rare sur le petit écran, excepté quelques incursions dans les séries Quantico et You : « Après Melrose Place et Desperate Housewives, j'ai toujours pensé qu'il y aurait un troisième acte. Mais il ne vient pas. Être une icône est une épée à double tranchant. Tout le monde pense que vous êtes ce personnage et au moment où ils l'oublient, vous n'êtes plus sur la liste de personne. »
L'occasion aussi de tacler l'industrie du spectacle et son obsession de la jeunesse : « Je me sens épanouie en tant qu'être humain, mais Hollywood ne s'intéresse pas à moi, il n'y en a que pour la chirurgie esthétique. On n'aime pas voir les femmes d'un certain âge à la télé. En Europe, on semble aimer les femmes de manière plus authentique, j'aimerais explorer ça. »
Son combat pour sensibiliser au papillomavirus
En attendant, la comédienne s'attache à « ce qu'il y a devant » elle. Et notamment son combat pour la prévention du cancer de l'anus, dont elle a été victime : « Quelles étaient les chances que je joue le personnage le plus coincé de la télévision et que j'attrape le type de cancer dont personne ne veut parler ?, s'est-elle demandé avec une épatante franchise. Au début, je n'osais pas le dire. Mais il y avait plein de gens qui ne connaissaient pas les papillomavirus [responsables de son déclenchement, NDLR], ou ses symptômes. J'aimerais affirmer que j'ai été courageuse mais, en fait, je n'avais pas le choix. Aujourd'hui, je peux parler des heures de l'anus, car tout le monde en a un. Moi, j'en ai un et il va bien ! »
Quand elle ne se fait pas la porte-parole de cette cause, Marcia Cross profite de ses jumelles de 15 ans, Eden et Savannah, nées pendant le tournage de la saison 3 de Desperate… : « C'était le plus beau jour de ma vie. J'avais un certain âge (45 ans), et si je voulais un enfant, c'était le moment ou jamais. On a filmé certaines scènes chez moi, car il a fallu que je sois alitée pendant un temps », s'est-elle souvenue, émue.
Et émouvante, comme lorsqu'elle a évoqué la mort de certains de ses partenaires, fauchés par le sida dans les années 1980. Ou quand elle a répété sa fierté d'être devenue une icône, notamment pour les gays. Touchante, enfin, Marcia Cross, lors de ses remerciements au public, les larmes aux yeux face à la standing ovation finale : « Je suis venue ici pour donner une masterclass. Je pensais que c'était à moi de donner, et je me suis aperçue que c'était un cadeau que l'on me faisait. Je le garderai toute ma vie. »
Avait dit : « Anus horribilis »...
Il y a comme des assonances, pas vrai ?
@Lorals : Tout a fait d'accord
Cela démontre une grande ignorance de ce cancer
Je la trouve courageuse cette Dame. Elle met sa notoriété (américaine) au service d'une cause très délicate, et cette pathologie est une vraie saloperie, comme tous les cancers.