« Thor : Love and Thunder » : tiens, Valhalla du boudin !

Humour usé, effets spéciaux médiocres, héros dévitalisé… Plus enclume que marteau, cet indigeste 4e volet, d’un ennui foudroyant, avilit la légende.

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Thor : Love and Thunder
Thor : Love and Thunder © Disney/Marvel Studios

Temps de lecture : 6 min

Les dieux Marvel sont-ils tombés sur la tête ? Comment diable ont-ils pu bénir la sortie en salle d'un produit aussi mal fignolé que ce pénible Thor : Love and Thunder  ? Cinq ans après l'hilarant Ragnarok, qui marquait un net virage du super-héros casqué vers la farce, le quatrième cru de ses aventures en solo nous ressert la même recette, en plus fade et lourdingue. Tout ce qui faisait le (relatif) sel du précédent volet – son humour potache, son recyclage malicieux de la sauce kitsch des années 1980, une pincée de drame au cœur de la gaudriole – semble ici n'être plus que redite paresseuse. Irrémédiablement mordue de la marque Marvel, la planète s'est malgré tout de nouveau ruée en masse au buffet : ce week end, le justicier nordique a déjà engrangé 302 millions de dollars de recettes au box-office mondial, dont 143 millions aux États-Unis. Sa performance américaine plafonne, certes, légèrement sous les prévisions (qui tablaient sur un étiage autour de 150 millions), mais reste supérieure à celle de Thor : Ragnarok en 2017 (122 millions). En clair : le dieu du tonnerre a encore foudroyé les salles.

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Mais attention ! Comme le soulignent nos confrères de CNN Business, à en croire la notation globale B+ associée au film sur l'agrégat de référence CinemaScore, les premières foules à se précipiter dans les multiplexes sont ressorties plutôt mitigées de leur séance. Depuis Avengers : Endgame, une sourde bronca circule à bas bruit sur les réseaux sociaux (et parmi les critiques) quant au niveau de qualité global des films Marvel, jugé en dents de scie. On est encore loin d'un désamour, mais un ratage aussi patent que Love and Thunder pourrait bien nourrir un début de défiance.

Taika Waititi, qui rempile à la mise en scène, avait pourtant promis une suite encore plus fofolle. Las : il a beau convoquer Zeus en personne (joué dans le film par Russell Crowe. Une cata !), Waititi n'est ni Midas ni Prométhée. Incapable de transformer en or son scénario de plomb, encore moins de retrouver le feu sacré dans le morne fil de ce récit sans flamme, il semble avoir enclenché le pilotage automatique, à l'instar de toute l'équipe embringuée dans ce fiasco – acteurs compris. On peut, certes, sauver du crash l'intrus Christian Bale, nouveau venu dans le MCU et le seul à insuffler un peu de vie à son personnage : un certain Gorr, extraterrestre humanoïde en colère contre les dieux restés indifférents à l'agonie de sa défunte fille. Armé d'une « nécrolame » faisant de lui l'égal des tout-puissants, Gorr fait le serment d'exterminer par vengeance tous les autres dieux, y compris Thor et ses camarades.

Pour le reste, quelle débandade ! Puisant partiellement leur inspiration dans un arc du comic book signé Jason Aaron, Taika Waititi et sa coscénariste Jennifer Kaytin Robinson font revenir Jane Foster (Natalie Portman) dans la vie du dieu du tonnerre, huit ans après leur séparation. Atteinte d'un cancer, la scientifique s'envole pour New Asgard (la mini-version sur Terre du monde de Thor, détruit dans Ragnarok), afin de trouver un remède à son mal. Par un bidouillage d'écriture à base d'ellipses foutraques (elles seront nombreuses tout au long de l'intrigue), Jane devient elle-même un Thor au féminin, après avoir établi une connexion avec le marteau Mjöllnir. Après une attaque de Gorr sur New Asgard, tous les enfants du royaume ont été kidnappés par ce dernier, qui les retient prisonniers dans une dimension parallèle. Thor et son complice Korg (la créature de pierre incarnée par Waititi), flanqués de Jane et de Valkyrie (Tessa Thompson), vont unir leurs forces pour sauver les mouflets.

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Thor : Love and Thunder fait illusion quelques minutes, lors d'un prologue lugubre exposant la malédiction de Gorr et le motif de sa vengeance… Mais très vite, l'indéboulonnable cahier des charges Marvel revient au galop avec une bataille rigolarde faisant écho à celle qui ouvrait Ragnarok. Malgré la présence (inutile) d'une partie des Gardiens de la galaxie, on est frappé par l'absence absolue de dynamisme, tant chaque plan ne semble que recycler des séquences d'images de synthèse stockées depuis Ragnarok ou n'importe quel autre film du MCU.

Waititi ressert le sempiternel cadrage au ralenti, en mode hommage au 9e art, de Thor s'élançant dans les airs pour frapper l'ennemi, le tout sur des arrière-plans numériques d'une laideur consommée. Les éternels mouvements de caméra circulaires n'étonnent plus guère et même Korg ne fait plus rire… On regarde sans émotion aucune ce spectacle multicolore mais terne que même le « Welcome to the Jungle » des Guns N' Roses sera bien en peine d'électriser. Ce sont d'ailleurs pas moins de quatre tubes chipés au gang du guitariste Slash qui seront dégainés tout au long du film, pour surligner encore et encore l'ambiance eighties, mais tout le procédé sent lui aussi la redite.

Pas d'éclair de génie pour le dieu du tonnerre

Le spectateur sent confusément, dès cette première grande scène d'action, que les deux heures à venir passeront à la vitesse d'une mule chargée à flanc de montagne : les péripéties s'enchaînent, mais, à force de dialogues sans éclat et de comédiens jouant à l'économie, l'intérêt ne décolle toujours guère. Thor : Love and Thunder touche même le fond lors de la visite du héros et de ses alliés à Omnipotence City afin de solliciter l'aide des divinités antiques. Notre indifférence vaguement lasse mute alors en colère froide face à l'apparition de Russell Crowe en Zeus d'opérette recuite. Épais comme une barrique, affublé d'un accent à base de roulage de « R » supposément grec ( ?), mais tirant davantage vers le mafieux russe, l'acteur en plastron doré, jupette blanche et bouclettes s'avilit dans une prestation à pleurer de grotesque et jamais drôle. Gladiator mort au champ d'honneur… On espère que le cachet en valait la peine.

Hormis l'interprétation de Christian Bale, on retiendra aussi de rares idées visuelles (comme ce basculement vers un noir et blanc clin d'œil à Murnau et Bergman, lors de l'entrée dans la dimension des ombres), un gag initialement drôle puis vite horripilant à force de plate répétition (les deux brebis hurlantes) et la vague intention de tragédie, à travers la maladie de Foster. Mais ces quelques singularités sont tellement vite aplaties par le rouleau compresseur de l'humour Marvel que rien n'accroche… Du moins pas suffisamment pour démolir le mur d'indifférence qui se dresse entre ce Thor de trop et le spectateur, jamais touché par les retrouvailles de l'Asgardien avec l'amour de sa vie. Et pour cause : disparue des radars depuis Thor : le monde des ténèbres, Jane Foster revient sur le tapis comme un cheveu sur la soupe et les feux de l'amour brûlent bien trop sagement entre l'Asgardien et la Terrienne.

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Il a beau faire un petit tour par le Valhalla, Thor : Love and Thunder échoue donc sur toute la ligne à nous emmener au septième ciel, loin de là. Incroyablement passif, ânonnant des répliques aux chutes piteuses qui tournent parfois au borborygme, Chris Hemsworth semble avoir de son côté atteint les limites du registre comico-bêta que lui impose Marvel depuis Ragnarok. On serait tenté de clore cette laborieuse critique en renouvelant notre conseil en direction du studio : attention à l'excès de confiance et au relâchement dans le contrôle qualité, même les fans les plus fidèles pourraient un jour se lasser. À l'image de ce Thor faisandé fleurant bon l'eau de boudin, gare à l'indigestion et aux piètres lendemains.

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Commentaires (9)

  • La Bogue

    Tunder ? C’est le nom d’un nouveau site de rencontres ? J’ai vu le mot boudin mais j’ai pas très bien compris la suite…

  • Alainlalanne

    Je n’ai jamais encore lu une critique aussi mauvaise (mais hyper drôle à lire) d’un film, à donner envie d’y aller pour voir si c’est vraiment aussi nul.

  • guy bernard

    Une critique Thor-dante et qui Thor le cou à ceux qui hurlent au chef d'œuvre ; par contre, le film cartonne...