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Il y a des histoires qu'il vaut mieux ne jamais déterrer. Trente ans après sa sortie, l'écrasante machine à reboots hollywoodienne ressort des placards le très singulier The Crow, film culte des années 1990 réalisé par Alex Proyas (Dark City et I, Robot). Dans la plus classique des traditions américaines, une bande-annonce de cette nouvelle version, prévue pour le 5 juin en France, a été dégainée en grande pompe cette semaine par le studio Lionsgate, studio à l'origine des sagas John Wick et Hunger Games, qui avait acquis les droits de la franchise l'an dernier.
Au programme du cru 2024, quelques gros noms – comme Bill Skarsgård (qui incarnait le clown Grippe-Sou dans la saga de Stephen King Ça ou la chanteuse britannique FKA Twigs – mais surtout un paquet d'inconnus). À commencer par un réalisateur, Rupert Sanders (Ghost in The Shell, Blanche Neige et le Chasseur), à la carrière creuse comme une coquille de noix.
Dans ces premières images, on retrouve le personnage d'Eric Draven, musicien effronté du premier film (incarné par Brandon Lee à l'époque, mais ici joué par Skarsgård) et sa fiancée Shelly Webster (Sofia Shinas en 1994, FKA Twigs aujourd'hui). La trame est, peu ou prou, la même. Difficile, de toute façon, de s'éloigner de la bande dessinée de James O'Barr (sortie en 1989), dont était déjà inspiré le long-métrage de Proyas. Comme il y a trente ans, le couple est donc toujours sauvagement assassiné par une bande de truands. Puis on assiste (encore !) à la résurrection d'un Draven immortel et assoiffé de vengeance, à qui un étrange corbeau a refusé le repos éternel.
Sauf qu'ici, exit les cheveux longs et le look (malgré tout glaçant) de catcheur dopé aux albums de Kiss qu'arborait Lee à l'époque. En 2024, le Crow se la joue punk. Au menu : des tatouages parsemant un torse souvent très découvert jusqu'aux contours des yeux, un trench noir délavé et une coupe mulet taillée aux petits oignons. Une apparence qui n'est pas sans rappeler l'affreux Joker de Jared Leto, dans le pas moins affreux Suicide Squad de David Ayer (2016). Une infamie doublée de clins d'œil bon marché à la série American Horror Story, ses bains de sang et son ambiance grunge…
Refaire The Crow : la fausse bonne idée ?
Mais plus que le seul volet artistique, c'est toute la portée symbolique de la première itération que ce remake remet en cause. Une bonne partie de la légende de The Crow avait été bâtie sur la mort en plein tournage, le 31 mars 1993, de Brandon Lee, fils de Bruce Lee et acteur principal du film. La tragédie centrale d'une production qui en aura connu de nombreuses, de l'électrocution d'un technicien à un plateau dévasté par la tempête. Le long-métrage avait malgré tout connu un carton critique et rencontré un petit succès commercial (50 millions de dollars de recettes à travers le monde, pour un budget de 23 millions).
Beaucoup se sont d'ailleurs déjà cassé les dents en tentant de prolonger l'épopée The Crow. La Cité des Anges (1996), deuxième volet de la saga, n'a pas dépassé les 18 millions de dollars récoltés au box-office. Salvation (2000), sa suite, n'a même pas fait l'objet d'une sortie en salle. Sans oublier l'échec cuisant de la série télévisée The Crow : Stairway to Heaven (1998-1999), annulée après une seule petite saison…
Si la même destinée funeste n'est évidemment pas souhaitée au film de Rupert Sanders, certains signes – comme cette bande-annonce peu alléchante – ne trompent pas.