« Thanksgiving : la semaine de l’horreur » : pourquoi ce film d’épouvante sort des sentiers battus

CRITIQUE. Passionné d’épouvante, le réalisateur de « Hostel » revient en pleine forme avec ce « slasher » où il tord les conventions du genre et s’en donne à cœur joie.

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Thanksgiving, la semaine de l'horreur, de Eli Roth. En salle le 29 novembre.
Thanksgiving, la semaine de l'horreur, de Eli Roth. En salle le 29 novembre. © TRISTAR PICTURES - SPYGLASS MEDI / Collection ChristopheL via AFP

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On en a vu mille. Pourtant, le slasher (tiré du verbe to slash, qui signifie taillader à l'aide d'un objet coupant) se porte comme un charme. Ce sous-genre du cinéma d'horreur, apparu en Amérique dans les années 1970, remplit depuis lors les caisses du box-office. Il raconte toujours la même histoire (un tueur psychopathe, défiguré ou masqué, massacre des adolescents à l'arme blanche), mais les jeunes en raffolent.

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Il y a eu d'ailleurs dans les années 1970-1980 de nombreux slashers qui se déroulaient pendant des jours fériés, dates clés ou célébrations comme Halloween (La Nuit des masques de John Carpenter), Noël (Black Christmas ; Douce nuit, sanglante nuit) ou la Saint-Valentin (Meurtres à la Saint-Valentin). Sans oublier la fête des mères (Mother's Day), la fête de fin d'études (Le Bal de l'horreur), le 1er avril (April Fool's Day), le vendredi 13 (qui a influencé la fameuse série de films d'horreur) ou le réveillon du Nouvel An (New Year's Evil). Mais dans ce calendrier macabre, Hollywood n'avait jamais produit de slasher sur Thanksgiving. C'est fait. 

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Eli Roth, lui, y pensait depuis l'âge de 12 ans. Né à Boston il y a 51 ans, le réalisateur de Hostel (2005) et Hostel, chapitre II (2007) a grandi dans le Massachusetts, cet État des États-Unis qui fut le berceau historique de la célèbre « fête de la moisson », un rituel qui favorise la prospérité des récoltes. Et une fête traditionnelle qui commémore l'arrivée des Pères pèlerins et des premiers colons anglais en Amérique sur le navire du Mayflower, dans la baie de Plymouth. Le cinéaste a été bercé depuis l'enfance par le repas familial de Thanksgiving (littéralement « l'Action de grâce ») et il songeait depuis longtemps à tourner un slasher sur le sujet. Son nouveau long-métrage, Thanksgiving : la semaine de l'horreur,sort enfin sur les écrans ce mercredi. Mais sa genèse fut longue et compliquée.

D'une fausse bande-annonce à un authentique long-métrage

Au départ, ce projet est parti d'une blague potache. En 2007, Eli Roth a signé la fausse bande-annonce d'un film d'horreur fictif intitulé Thanksgiving pour accompagner le double programme Grindhouse de ses amis Quentin Tarantino et Robert Rodriguez aux États-Unis (une double séance qui réunissait les films Boulevard de la mort et Planète terreur). Suite à l'accueil triomphal de cette bande-annonce délirante, qui compte de nombreux fans parmi les geeks, Roth a commencé à prendre ce projet au sérieux et à envisager d'en tirer un authentique long-métrage (à la façon de la fausse bande-annonce de Machete en 2007 qui est devenue un véritable film de Rodriguez en 2010).

Pendant seize ans, il a écrit et réécrit le script de Thanksgiving avec son coscénariste Jeff Rendell pour obtenir la meilleure intrigue possible. Les deux hommes lui ont trouvé un point de départ original : l'action se déroule de nos jours dans la ville de Plymouth (Massachusetts), où ont débarqué les fameux pèlerins en 1620. La scène d'ouverture se déroule de nuit sur le parking de l'hypermarché Right Mart, où s'est agglutinée une foule de personnes pour l'événement commercial du Black Friday, qui marque le coup d'envoi de la période des achats des fêtes de fin d'année. Chacun veut profiter des importantes remises du magasin.

Séquences de meurtres inventives

Mais quand il ouvre ses portes, le Black Friday vire à l'émeute ! L'orgie consumériste provoque une hystérie collective. Dans la bousculade, des hommes et des femmes se font marcher dessus, écraser par la foule, traîner sur le bitume, percuter par des chariots ! D'autres y laissent la vie… Un vrai carnage. En bon satiriste, Eli Roth filme cette séquence avec un humour féroce et porte un regard critique sur la société d'hyperconsommation. Il fait monter graduellement la tension et, quand elle explose, le spectacle fait froid dans le dos.

© TRISTAR PICTURES - SPYGLASS MEDI / Collection ChristopheL via AFP

Un an après ce terrible fait divers, on revient dans le comté de Plymouth, à la veille du Thanksgiving Day. Là, un mystérieux tueur prépare un plan machiavélique pour se venger d'un groupe d'adolescents qui, à ses yeux, sont en partie responsables du massacre du Black Friday survenu un an plus tôt. Portant un chapeau de quaker, un masque à l'effigie de John Carver (le premier gouverneur de la ville de Plymouth) et un costume de pèlerin, ce déséquilibré va éliminer l'un après l'autre les étudiants qu'il juge coupables (le mobile de ses crimes ne sera révélé qu'à la fin du film). Certains seront d'ailleurs les invités de son grand repas de Thanksgiving, où il ne se contentera pas de découper la dinde farcie aux marrons !

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La police tente d'arrêter le criminel, qui sème la terreur dans la ville, mais durant le défilé de Thanksgiving, tout le monde porte le même masque. Ce qui rend difficile l'identification du tueur. Le film devient alors ludique et se transforme en whodunit : on cherche à résoudre l'énigme et à démasquer l'assassin. Mais le script d'Eli Roth est assez rusé. Il nous entraîne constamment sur de fausses pistes, et bien malin celui qui devinera l'identité du serial killer. Le film agence aussi de nombreuses scènes d'angoisse, des jump scares, consistant à faire sursauter le spectateur et surtout des séquences de meurtres très inventives ! Ici, l'utilisation par le tueur d'une scie circulaire électrique, d'un four de cuisine, de piques à épis de maïs ou d'un attendrisseur à viande fait des ravages. Le trampoline d'un gymnase ou le mât d'un voilier lors de la parade de Thanksgiving aussi – on vous laisse la surprise…

Le film de Eli Roth, sorti en salle le 29 novembre.
 ©  TRISTAR PICTURES - SPYGLASS MEDI / Collection ChristopheL via AFP
Le film de Eli Roth, sorti en salle le 29 novembre. © TRISTAR PICTURES - SPYGLASS MEDI / Collection ChristopheL via AFP

Patrick Dempsey en shérif de service !

Pour le reste, le film prend pour héros une bande de teenagers très stéréotypés (la bimbo écervelée, le quarterback du lycée…), accros à leur téléphone portable et aux réseaux sociaux. Des personnages assez conventionnels et sans grande épaisseur. Dans le casting, on retrouve la star de TikTok Addison Rae. Et surtout Patrick Dempsey, le célèbre Docteur Mamour de la série médicale Grey's Anatomy, dans le rôle du shérif. À 57 ans, le beau gosse fait son grand retour au cinéma dans le film d'Eli Roth, mais aussi dans le Ferrari de Michael Mann avec Adam Driver, qui sera diffusé en exclusivité début 2024 sur le site de streaming Amazon Prime Video. Ce mois-ci, il a aussi été élu « homme le plus sexy de l'année » (« Sexiest Man Alive ») par le magazine américain People.

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Après avoir produit les deux derniers volets de la série Scream, la société de production américaine Spyglass s'est donc associée avec TriStar Pictures et Sony pour financer Thanksgiving. Sorti le 17 novembre dernier (soit six jours avant les célébrations de Thanksgiving) aux États-Unis dans 3 200 salles, le film a déjà récolté plus de 25 millions de dollars de recettes en douze jours. On est content pour Eli Roth, qui revient à son genre de prédilection – l'horreur –, qu'il avait délaissé depuis dix ans (en gros, depuis son film de cannibales The Green Inferno en 2013). En effet, il nous avait un peu déçu avec son polar Death Wish (2018), un remake tardif d'Un justicier dans la ville avec Bruce Willis en lieu et place de Charles Bronson.

Avec ses débordements gores et son humour très noir, son Thanksgiving est en revanche un petit trip horrifique qui devrait enthousiasmer tous les fans du genre. De quoi patienter jusqu'au prochain film d'Eli Roth, Borderlands, qui sortira en France le 7 août 2024. On retrouvera Cate Blanchett dans cette adaptation d'un jeu vidéo à succès situé dans un univers postapocalyptique à la Mad Max. Eli Roth confirmera-t-il avoir pour de bon renoué avec sa verve de jadis ? Vivement l'été prochain pour le découvrir.

Thanksgiving : la semaine de l'horreur de Eli Roth (1 h 47). En salle le 29 novembre.

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