« Les Choristes » : l’histoire d’un phénomène racontée 20 ans après

Phénomène international en 2004, la fable de Christophe Barratier ressort en salle pour ses 20 bougies. Le réalisateur ainsi que Gérard Jugnot et le compositeur Bruno Coulais se souviennent…

Par Lucas Fillon

Gérard Jugnot et Jean-Baptiste Maunier à la tête des Choristes.
Gérard Jugnot et Jean-Baptiste Maunier à la tête des Choristes. © REX FEATURES/SIPA / SIPA / Moviestore Collection / Rex Feat

Temps de lecture : 5 min

Mercredi 17 mars 2004. Les Choristes, premier long-métrage de Christophe Barratier, sort en salle. Les exploitants retiennent leur souffle. On tiendrait là l'un des cartons du printemps. Les multiples avant-premières ont montré que le public est particulièrement touché par le film.

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Les Choristes, qui se déroule en 1949, suit un musicien raté, Clément Mathieu (Gérard Jugnot), qui, par dépit, accepte un poste de pion dans un internat pour jeunes garçons aux situations familiales difficiles. Ils sont d'ores et déjà considérés comme des causes perdues. Mais, peu de temps après son arrivée, Clément Mathieu a une idée : former une chorale. Contre toute attente, la pratique du chant passionne les enfants. Et l'un d'eux, Pierre Morhange (Jean-Baptiste Maunier), révèle une voix exceptionnelle. Toutefois, dans un accès de colère, Rachin, le terrible directeur de l'internat (François Berléand), met fin à la chorale. La rébellion s'organise…

Lors de sa première semaine d'exploitation, Les Choristes rassemble près de 790 000 spectateurs. Comme attendu, le film marche. Puis il surprend, dépassant les estimations les plus folles. Il termine sa carrière à près de… 8,6 millions d'entrées ! Ce n'est plus un triomphe, c'est un phénomène de société. À l'occasion de son 20e anniversaire, le film revient, ce mercredi 10 avril, dans une version restaurée, à l'affiche de près de 300 salles – un nombre énorme pour une ressortie. Comment Les Choristes est-il devenu l'une des plus incroyables réussites du cinéma français ? On rembobine.

Les choristes, du cauchemar au conte de fées

Début des années 2000. Après la réalisation en 2001 d'un court-métrage, Christophe Barratier est prêt à passer au long. Il choisit de s'atteler au remake d'un film qu'il a découvert à la télévision : La Cage aux rossignols. Datant de 1945, cette œuvre de Jean Dréville a au cœur de son récit le chant choral. Un sujet qui résonne chez Christophe Barratier, lui qui, enfant, avait été inscrit par sa grand-mère dans une chorale laïque. « J'y ai connu des moments magnifiques, qui ont contribué à mon éveil musical », se souvient-il.

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Il écrit le scénario en 2002 et propose le rôle de Clément Mathieu à Gérard Jugnot. L'acteur est dubitatif, craignant qu'un film autour d'une chorale, cela fasse un peu « daté ». « Pour ma part, j'étais persuadé que, si je réussissais à ne pas montrer le chant choral de manière caricaturale, à retranscrire la grâce qu'il peut avoir, l'émotion adviendrait », indique Christophe Barratier.

Gérard Jugnot est finalement convaincu et rejoint l'aventure, aux côtés de François Berléand et Kad Merad, tandis que Jacques Perrin, l'oncle de Christophe Barratier, produit (il joue également dans le film). La bande originale est confiée à Bruno Coulais. Christophe Barratier, musicien, est aussi impliqué dans la composition. Par exemple, il signe les paroles de « Vois sur ton chemin » – la chanson phare du film – et cosigne, avec Bruno Coulais, celles de « Caresse sur l'océan ». « Pour moi, c'était épatant de pouvoir envoyer une partition à un réalisateur et qu'il rebondisse dessus, commente Bruno Coulais. Avec Christophe, tout s'est passé naturellement. On parlait le même langage. »

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Alors que, dans l'histoire, la chorale ne regroupe que des garçons, c'est, dans la réalité, une chorale constituée de garçons et de filles qui interprète les chansons un mois avant le tournage, prévu à l'été 2003. Cette chorale, lyonnaise et dirigée par Nicolas Porte, s'appelle Les Petits Chanteurs de Saint-Marc. Bruno Coulais et Christophe Barratier la repèrent en mars 2003. Et au sein de celle-ci figure un jeune soliste : Jean-Baptiste Maunier.

Pour Christophe Barratier, c'est une évidence : il est Pierre Morhange. En revanche, pour les autres rôles d'enfants, le réalisateur réunit des bambins vivant en Auvergne, là où se déroulera le tournage. Les enfants apparaissant à l'écran chantent donc en play-back – Jean-Baptiste Maunier chante lui aussi en play-back, mais sur sa propre voix. Quant au score, il sera enregistré en Bulgarie et un chœur d'enfants bulgares y participera.

Les prises de vues démarrent bien à l'été 2003 au château Ravel, à quelques kilomètres de Clermont-Ferrand. Et là, c'est le cauchemar. La France est frappée par la canicule. « Dans l'une des premières séquences, j'arrive à l'internat et, à cet instant du film, nous sommes en janvier, se remémore Gérard Jugnot. J'étais habillé comme quelqu'un affrontant l'hiver et il faisait… 43 degrés ! » À cette canicule s'ajoutent la grève des intermittents et des changements, pour diverses raisons, à faire dans les équipes technique et artistique. « Cela partait vraiment mal. Puis le ciel s'est éclairci. J'ai pu reprendre le cap. Et la magie a opéré », indique Christophe Barratier.

« Vois sur ton chemin » interprétée par Beyoncé aux Oscars

Le montage terminé, c'est l'emballement. Les premières projections sentent le parfum du succès. « Les spectateurs nous disaient d'abord “Merci” avant “Bravo”. Il y a eu un attachement immédiat au film et un souhait de le partager. On a compris que le bouche-à-oreille serait puissant », souligne Christophe Barratier. Déferle sur la France un tsunami : en plus des 8,6 millions d'entrées, la BO est vendue à près de 3 millions d'exemplaires dans le monde, les chorales sont désormais tendance, tandis que la télévision s'empare du phénomène – TF1, notamment, propose l'émission Les 500 Choristes ensemble. Jean-Baptiste Maunier acquiert le statut de star à seulement 13 ans ; Gérard Jugnot est au sommet de sa popularité.

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À l'étranger, le film est vu par environ 8 millions de personnes. En 2005, après avoir été nommé aux Golden Globes et gagné deux césars (un pour la musique, un pour le son), Les Choristes décroche deux nominations aux Oscars, une dans la catégorie « meilleur film international » et une – fait rarissime pour la France – dans la section « meilleure chanson » avec « Vois sur ton chemin ». Beyoncé l'interprète sur scène, dans la langue de Molière. « Depuis, le film continue d'exister. Ce qui me rend fier, c'est qu'il se transmet de génération en génération », note Gérard Jugnot. Christophe Barratier complète : « Je crois que Les Choristes est surtout une fable sur les joies et les blessures de l'enfance. Et ça, c'est universel et intemporel. » La musique aussi vit sa propre vie. Par exemple, en 2023, le DJ allemand Bennett dévoile sa version techno de « Vois sur ton chemin » et, bien évidemment, c'est un tube.

Décliné en comédie musicale à partir de 2017, visible aussi en ciné-concert, Les Choristes devrait revenir sous la forme d'une série. « Je suis en pleine écriture », nous précise Christophe Barratier. En attendant, le film, lui, est absolument à (re)voir sur grand écran. Cette belle histoire dégage une émotion toujours aussi juste. Et on ne serait pas étonné que le nombre d'inscriptions dans les chorales augmente légèrement dans les semaines à venir…

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Commentaires (3)

  • le Teckel a poils durs

    A contre courant de l’époque c’est sans doute ce qui en fait son charme.

  • PMAMMA

    Un moment magique….

  • Djill-59

    Un grand moment !