Comment Dragon Ball et Naruto partent à l'assaut des millennials

Les deux plus grosses franchises de l'histoire du manga se relancent avec une nouvelle formule pour séduire un public plus jeune. Éclairage.

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La couverture de Dragon Ball Super.
La couverture de Dragon Ball Super. © Editions Glénat

Temps de lecture : 5 min

Tous les amateurs de mangas les vénèrent... Ils n'ont plus qu'à se prosterner de nouveau : Dragon Ball Super et Boruto : Naruto Next Generations sont enfin de retour en librairie, respectivement publiés aux éditions Glénat et Kana. Ces deux séries refont surface après des années d'absence. Dragon Ball, légèrement tombé en désuétude, s'est arrêté en 1995 après 11 ans d'aventures, 42 volumes et plus de 300 millions d'exemplaires écoulés. À l'époque, le magazine Weekly Shonen Jump , qui publiait toutes les semaines un nouveau chapitre, pouvait vendre jusqu'à 6,5 millions d'unités. Le manga d'Akira Toriyama a été le véritable ambassadeur de la bande dessinée japonaise à travers le monde. Œuvre ultra-culte qui bénéficie d'une franchise gigantesque entre films, séries animées et jeux vidéo.

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Les aventures de Son Goku, le petit garçon à la queue de singe, ont inspiré de nombreux auteurs, notamment Masashi Kishimoto, créateur de Naruto. Le jeune ninja a dominé les ventes pendant quinze ans (avec One Piece d'Eiichiro Oda, qui est en toujours cours de parution) et a totalisé plus de 220 millions de livres écoulés sur 72 volumes. Sa sortie a participé grandement à la pérennisation du manga en France. 18 millions d'exemplaires de Naruto ont été vendus entre 2002 et 2016. La génération 90 avait Dragon Ball ; celle des années 2000 a été bercée par Naruto et One Piece ; il est désormais grand temps pour ces franchises rivales de s'intéresser aux adolescents d'aujourd'hui, les millennials, aussi appelés génération Z, tout en ravivant la nostalgie chez les fans de la première heure. Le nouveau cru Naruto et Dragon Ball a-t-il réussi son pari ?

Boruto, on prend les enfants et on recommence

Les lecteurs français peuvent découvrir depuis mars la destinée du fils de Naruto, Boruto. L'auteur Masashi Kishimoto supervise cette suite après avoir sorti un one-shot appelé Naruto Gaiden et scénarisé le film Boruto qui introduit une toute nouvelle génération de personnages que l'on retrouve dans ce manga, logiquement intitulé Next Generations. Plus d'une dizaine d'années après l'épilogue de la grande guerre des ninjas, nous suivons les aventures des enfants de nos héros. Cette suite a été planifiée par le grand manitou dans un but fédérateur et commercial totalement assumé : l'objectif était de créer une œuvre intergénérationnelle qui tienne la route. « Kishimoto est devenu l'un des hommes les plus riches du Japon, c'est aussi devenu un homme d'affaires », rappelle Sébastien-Abdelhamid Godelu, journaliste spécialiste des mangas.

Le redoutable Kishimoto signe un habile passage de relais sur fond de relation père-fils. Une des forces du récit est de montrer les faiblesses des personnages qui étaient les héros de la première génération. Naruto, qui a enfin atteint son rêve de devenir le chef du village, est un parent absent et surchargé de travail. Les thématiques de Boruto sont proches des questionnements des adolescents entre la quête de leurs origines, la confrontation familiale entre père et fils et le parcours initiatique. Le manga introduit de la nouveauté qui plaira certainement aux adolescents d'aujourd'hui, tout en mettant en place une trame narrative très classique, presque conventionnelle, et similaire à celles des anciennes aventures. Kishimoto assure la continuité de manière efficace, sans prendre de grands risques. Pour Sébastien-Abdelhamid Godelu, « on est dans une filiation père-fils qui est en soi une nouveauté. Le passage de témoin est réussi. Il y a un nouveau souffle pour la franchise Naruto, réalisée d'une manière intelligente. Ils se sont adaptés à la génération Naruto. Ce n'est pas que du fan service ». La madeleine de Proust fonctionne pour Naruto. Qu'en est-il de Dragon Ball ?

L'art de faire du neuf avec du vieux

La suite tant attendue des aventures de Végéta, Piccolo et Son Gohan s'est révélée beaucoup plus délicate à mettre sur les rails. Alors que Kishimoto avait entretenu la flamme Naruto avec un one-shot d'une dizaine de chapitres, la franchise Dragon Ball, a, quant à elle, été laissée en jachère pendant plus de dix ans. Akira Toriyama ne voulait plus travailler sur son œuvre. Dans son excellent livre Dragon Ball aux éditions Third, Valérie Précigout raconte comment l'auteur a tenté à de nombreuses reprises d'arrêter sa série. Se sentant prisonnier de son succès et des terribles pressions infligées par son éditeur, il fit en sorte de terminer Dragon Ball de manière abrupte. Il faudra attendre 15 ans pour qu'il témoigne de nouveau de l'intérêt pour sa saga. Le 5 juillet 2015 marque à la télévision la renaissance officielle de la série avec son auteur à la narration. Après Dragon Ball, Dragon Ball Z, le troisième arc narratif devient Dragon Ball Super.

Le manga sorti le 5 avril reprend le scénario de la série TV. L'histoire commence six mois après la fin du combat contre Boo. Il met en scène les héros de la série face au dieu de la destruction Beerus qui recherche le Super Saiyan God. Avoir visionné la série TV et les deux films spin-off Dragon Ball Z : Battle of Gods et Dragon Ball Z : la résurrection de Freeza n'est (heureusement) pas obligatoire. Le scénario est supervisé par Akira Toriyama et les dessins sont faits par Toyotaro, qui reproduit à l'identique le style du maître. Ce jeune mangaka s'est illustré dans des fans-fictions de l'univers Dragon Ball. Si vous êtes un fan inconditionnel de la série, vous apprécierez.

Intérêt analytique

Nous retrouvons tout ce qui fait l'essence de la saga entre les tournois d'arts martiaux, les entraînements intenses, l'humour potache, les héros qui n'ont pas changé depuis vingt ans ainsi que de nombreux méchants encore plus forts. « On est sur un nouveau phénomène Dragon Ball qui souhaite drainer toute les générations. J'ai été enchanté par la qualité du dessin, qui est très proche de Toriyama. C'est bien découpé et traduit. C'est un très bon manga sur le fond et sur la forme » , explique Sébastien-Abdelhamid Godelu. L'auteur a introduit la notion d'univers parallèle permettant de très larges références aux précédents volumes, ce qui donne un patchwork intrigant habité par un sentiment de déjà-vu.

Très efficace avec un graphisme agréable, les principaux défauts de ce premier tome sont les multiples ellipses narratives rendant un scénario brouillon et frustrant. Ceux qui ont regardé la série TV trouveront tout de même un intérêt analytique à cette nouvelle œuvre, explique Valérie Précigout : « Entre les ajouts bienvenus, les pages bonus et les quelques variantes opérées dans le déroulement de certaines scènes, le manga apporte ainsi une plus-value digne d'intérêt pour les inconditionnels de Dragon Ball Super. » Reste à savoir si les jeunes lecteurs suivront ou si la saga emblématique des années 90 se fera coiffer au poteau par le fringant blondinet Boruto.

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