Bandes dessinées : notre sélection pour Noël !

À quelques jours de Noël, « Le Point » vous propose une sélection de dix bandes dessinées, qui mêle valeurs sûres et talents méconnus.

Notre sélection de 10 BD pour Noël 2023.
Notre sélection de 10 BD pour Noël 2023. © DR

Temps de lecture : 8 min

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Alors que le nombre de nouveautés en bandes dessinées (plus de… 5 000 sorties encore une fois cette année) a de quoi faire tourner les têtes, Le Point vous aide à faire votre choix avant les fêtes dans cette jungle aussi impénétrable que luxuriante. Bien sûr, il y a les mastodontes comme Astérix, Gaston Lagaffe, Blake et Mortimer, Titeuf, Largo Winch ou Blacksad, qui écrasent tout sur leur passage depuis plusieurs semaines. Mais derrière ces titres phares, dont Le Point vous a déjà parlé au moment de leur sortie, il y a aussi des pépites mêlant valeurs sûres et talents méconnus, qui feront le bonheur de tous les âges.

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Les rêveries d'un promeneur libanais

C'est le coup de cœur de la rédaction et du jury du Prix Wolinski de la BD du Point, qui en a fait son lauréat 2023. Dans cette splendide rêverie autobiographique, qui juxtapose photos, aquarelles et crayonnés, Charles Berberian rend hommage à Beyrouth et aux fantômes qui peuplent la cité chérie et martyre de la diva Feyrouz. D'abord Yaya, la grand-mère, monstre d'empathie et d'amour, qui accueille le petit Charles à son arrivée de Bagdad en 1969. Et surtout, Alain, le frère récemment disparu, dont la rudesse feinte dissimule un océan de tendresse à l'égard d'un cadet éperdu d'admiration pour son aîné, qui l'initie à la pop musique et au cinéma – Alain Berberian deviendra par la suite le réalisateur, entre autres, de La Cité de la peur des Nuls. Une splendeur.

« Une Éducation orientale », de Charles Berberian.
 ©  Casterman
« Une Éducation orientale », de Charles Berberian. © Casterman

« Une Éducation orientale », de Charles Berberian (Casterman), 160 p., 25 euros.

Dallas-sur-Yopougon

Il avait fallu attendre près de… 12 ans pour retrouver enfin, en 2022, l'univers d'Aya, l'irrésistible soap opera ivoirien créé par Marguerite Abouet et Clément Oubrerie en 2007. Mais cette fois, les deux complices n'ont pas fait trop longtemps souffrir les 900 000 fidèles accros à cette série bouillonnante et à ses protagonistes confrontés à de délicats désirs d'émancipation. Albert a été chassé par ses parents et confié à un couple de paysans pour le guérir de son homosexualité, alors qu'Innocent a choisi de partir en France pour vivre son orientation plus paisiblement – ce qui s'avère loin d'être simple. Bintou, devenue une star du petit écran, après avoir subi les foudres de téléspectateurs déchaînés qui la confondaient avec son (odieux) personnage, retourne la situation avec maestria, tandis qu'Aya, qui avait pris la tête d'une fronde à l'université, doit garder la tête froide dans ce tourbillon effréné.

« Aya de Yopougon », de Marguerite Abouet et Clément Oubrerie.
 ©  Gallimard BD
« Aya de Yopougon », de Marguerite Abouet et Clément Oubrerie. © Gallimard BD

« Aya de Yopougon ». Volume 8 de Marguerite Abouet et Clément Oubrerie (Gallimard BD), 104 pages, 18 euros.

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Les héritiers de Tom-Tom et Nana

Vous étiez désespéré par la retraite (bien méritée) de Bernadette Després, la créatrice du cultissime Tom-Tom et Nana, les deux garnements de la famille Dubouchon ? Ne pleurez plus, car voici venir avec Pépin et Olivia leurs dignes émules. Fruit de l'imagination de Camille Jourdy, l'autrice de Rosalie Blum (adapté au cinéma) et du splendide conte enfantin Les Vermeilles, ce facétieux duo évolue dans un dessin d'une délicatesse et d'une sensibilité inouïes. Au fil d'une déambulation dominicale, Pépin et Olivia se remémorent quelques-unes de leurs aventures, entre sortie en forêt avec leur grand-mère de compétition, visite à la fête foraine avec son inévitable train fantôme et expérimentations culinaires périlleuses de leur papa (cake thon-vanille et saucisse aux fraises !). Un petit bijou.

« Pépin et Olivia. La Grande fête de rien du tout », de Camille Jourdy.
 ©  DUP AUTEUR
« Pépin et Olivia. La Grande fête de rien du tout », de Camille Jourdy. © DUP AUTEUR

« Pépin et Olivia. La Grande fête de rien du tout », de Camille Jourdy (Dupuis), 128 pages, 19 euros.

Lou, l'âge de (dé)raison

Dans le monde de la bande dessinée où héros et héroïnes guettent avec anxiété les rides autant que les stars hollywoodiennes, Lou fait figure de remarquable exception. Les fans du personnage conçu par Julien Neel en 2004 connaissent en effet le bonheur de vieillir (presque) au même rythme que celle qui est désormais une jeune femme, et qui a traversé enfance et adolescence au fil d'albums oscillant entre réalisme et fantaisie poétique. Dans ce deuxième volume du diptyque Sonata, Lou se lance dans l'organisation d'un festival de musique champêtre à Mortebouse, avec cabanes dans les arbres, défilé de chars fleuris et toilettes sèches (bien sûr). Et malgré le mauvais temps, les errances géographiques du groupe star attendu et les saillies d'une grand-mère toujours éruptive, Lou continue à grandir entourée d'un petit monde dont elle est l'astre rayonnant.

« Lou ! Sonata tome 2 », de Julien Neel.
 ©  Glénat
« Lou ! Sonata tome 2 », de Julien Neel. © Glénat

« Lou ! Sonata, tome 2 », de Julien Neel (Glénat), 144 pages, 17,50 euros.

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In Love with Shakespeare

Il y avait eu la Trilogie anglaise des duettistes de la ligne Claire Floc'h et François Rivière. Il faudra désormais compter avec celle de Jean Harambat. L'auteur du magnifique Ulysse. Le chant du retour (Prix de la BD du Point en 2014) est aussi un fin connaisseur de toute une culture so british, qui va de Thomas Rowlandson à Posy Simmonds, en passant par David Niven et Peter Ustinov. Il a fait de ces deux olibrius les héros de sa délicieuse Opération Copperhead, avant d'offrir un whodunit jubilatoire dans Le Detection club. Cette Pièce manquante conclut en apothéose ce triptyque autour d'une intrigue livresque à la Umberto Eco, consacré à la recherche d'une pièce disparue de ce bon vieux William S. C'est dans cette quête que se lance en 1744 un duo explosif composé de Peg Woffington, une actrice irlandaise, et Ignatius Sancho qui fut, dit-on, le premier Noir connu à avoir voté en Grande-Bretagne. Œuvre picaresque au rythme endiablé, La Pièce manquante ne saurait faire défaut sous votre sapin.

« La Pièce manquante », de Jean Harambat.
 ©  DARP-HORS COLL
« La Pièce manquante », de Jean Harambat. © DARP-HORS COLL

« La Pièce manquante », de Jean Harambat (Dargaud), 160 pages, 21,50 euros.

Le puzzle américain de Dan Clowes

Le nom de Dan Clowes ne vous dira peut-être pas grand-chose, mais il est aujourd'hui l'un des deux ou trois plus grands auteurs de bande dessinée outre-Atlantique. Cet explorateur fin et obsessionnel de la psyché américaine est en particulier l'auteur du sublime Ghost World (formidablement adapté au cinéma avec une toute jeune Scarlett Johansson), et plus globalement d'une œuvre cérébrale où l'incommunicabilité règne en maître. Dans Monica, les chapitres s'enchaînent sur des individus aux parcours chaotiques et, du moins en apparence, sans lien. Ce sommet de beau bizarre dessine un visage angoissant de l'Amérique, où suinte une solitude que Jim Morrison chantait déjà en 1967 : « Les gens sont étranges quand vous êtes un étranger. »

« Monica », de Dan Clowes.
 ©  Delcourt
« Monica », de Dan Clowes. © Delcourt

« Monica », de Dan Clowes (Delcourt), 106 pages, 21,90 euros.

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Avant le manga

La Pérégrination vers l'Ouest relève-t-il de la bande dessinée ? Pas vraiment. Quoique… Inspiré d'un roman-fleuve venu de Chine à la fin du XVIIe siècle, ce « roman » fantastique et illustré met en scène le moine Tripaka et un certain roi-singe prénommé… Son Goku – qui donna son patronyme au héros du Dragonball d'Akira Toriyama, l'un des mangas les plus populaires au monde. Cette édition fleuve, conçue sous la direction de Christophe Marquet, spécialiste reconnu de l'ère Edo (1603-1868), reprend des illustrations de la seconde édition publiée au Japon dans la première moitié du XIXe siècle. Il faut se laisser emporter par ce flot d'estampes et de textes à la force poétique singulière, et dont la dimension initiatique (la recherche de textes fondateurs du bouddhisme) est un prétexte à l'exploration de mondes lointains et fascinants, non loin du Mahabharata ou de l'Odyssée.

« La Pérégrination vers l’Ouest. » Intégrale des illustrations de l’édition japonaise de 1806-1837.
 ©  Éditions 2024
« La Pérégrination vers l’Ouest. » Intégrale des illustrations de l’édition japonaise de 1806-1837. © Éditions 2024

« La Pérégrination vers l'Ouest. Intégrale des illustrations de l'édition japonaise de 1806-1837 »(éditions 2024), 836 pages, 69 euros.

Vers le Nouveau Monde

Magellan n'a pas bonne presse, c'est une chose entendue. Ce Portugais « vendu » aux Espagnols, qui avait tout d'un soldat mais rien d'un érudit, était dévoré par un rêve promis au futur Charles Quint : il réussirait là où Christophe Colomb avait échoué ! Il gagnerait les Indes par l'Ouest et lui rapporterait d'immenses richesses telles que… des clous de girofle ! Ce bel ouvrage, qui retrace avec une exactitude scrupuleuse la folle expédition, est l'adaptation d'une mini-série diffusée sur Arte, œuvre conjointe du documentariste François de Riberolles et d'Ugo Bienvenu, nouveau petit génie du dessin et de l'animation made in France. Du départ de Magellan, le 20 septembre 1519 jusqu'aux retours en Espagne des… 18 survivants le 6 septembre 1522, en passant par la mort tragique de Magellan au cours d'un affrontement contre des autochtones qui refusaient de se convertir, revivez une aventure qui changea la face du monde.

« L’Incroyable périple de Magellan », de François de Riberolles et Ugo Bienvenu.
 ©  Denoël
« L’Incroyable périple de Magellan », de François de Riberolles et Ugo Bienvenu. © Denoël

« L'Incroyable périple de Magellan », de François de Riberolles et Ugo Bienvenu (Denoël), 192 pages, 42 euros.

Oraison funèbre canine

Vous connaissiez le baron François Schuiten, légendaire dessinateur de la série des Cités obscures avec son complice Benoît Peeters, et Grand Prix de la ville d'Angoulême en 2002 ? Découvrez l'inconsolable ami de Jim, qui offre à son fidèle compagnon, auquel il resta « vissé » plus de treize ans, un mausolée dessiné aussi émouvant qu'inattendu. Dans ces pages, Schuiten fait revivre et incarne le lien indicible qui unit l'animal à celui qui n'avait rien d'un « maître ». Dans le regard que traduisent les crayonnés, l'homme se fait discret, accablé et modeste, là où Jim brille par son humanité et son désintéressement. Jim a rejoint le monde des rêves, là même où Schuiten le retrouve, en digne héritier de Pline l'Ancien, qui confessait dans son catalogue des espèces animales : « Seuls les chiens connaissent leur maître, et ils savent que c'est lui, même s'il vient à l'improviste et incognito. »

« Jim », de François Schuiten.
 ©  Rue de Sèvres
« Jim », de François Schuiten. © Rue de Sèvres

« Jim », de François Schuiten (Rue de Sèvres), 128 pages, 16 euros.

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Les fantômes de l'Apartheid

C'est un épisode oublié de la lutte contre le sinistre régime de l'Apartheid, qui instaura en Afrique du Sud, entre 1948 et 1991, des politiques radicales de séparation et de discrimination raciale. Nombre de militants de l'ANC, le principal mouvement d'opposition à l'Apartheid, dont Nelson Mandela était l'un des cadres, décidèrent de continuer le combat depuis l'étranger. Dulcie September était l'une d'entre eux, et elle fut assassinée en plein cœur de Paris, le 29 mars 1988, la veille de l'élection de François Mitterrand pour son second mandat. Le journaliste d'investigation Benoît Collombat et le dessinateur Grégory Mardon mènent l'enquête sur cette affaire non résolue, qui se solda par un non-lieu. En revenant sur la vie de Dulcie September, Collombat dénoue les fils d'une histoire complexe, celle de l'Afrique du Sud, mais aussi celle des relations inavouables de la France avec le régime de l'Apartheid, à qui elle fournissait armes ou ingénieurs en industrie nucléaire. Comme le déclare un chercheur sud-africain aux auteurs, « ce sont des individus qui ont tué Dulcie September, mais c'est tout un système qui a appuyé sur la gâchette. »

« Dulcie. Du Cap à Paris, enquête sur l’assassinat d’une militante anti-apartheid », de Benoît Collombat et Grégory Mardon.
 ©  Futuropolis
« Dulcie. Du Cap à Paris, enquête sur l’assassinat d’une militante anti-apartheid », de Benoît Collombat et Grégory Mardon. © Futuropolis

« Dulcie. Du Cap à Paris, enquête sur l'assassinat d'une militante anti-apartheid », de Benoît Collombat et Grégory Mardon (Futuropolis), 304 pages, 28 euros.

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